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Antoine Calmet (Dom Augustin Calmet en religion), bénédictin de la congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe, fut l'un des érudits les plus laborieux et les plus prolifiques qu'ait produit l'ordre de Saint Benoît. Il naquit à Ménil-la-Horgne le vendredi 26 février 1672 au sein d'une famille modeste. Son père, qui exerçait la profession de maréchal-ferrant, se nommait Barthélemy Calmet, et sa mère Anne François, et quoiqu'ils fussent d'une condition bien humble, leur fils eut pour parrain Antoine du Laurens, conseiller en la cour souveraine, et pour marraine Mme de Réance d'Auranville, auxquels appartenaient probablement les deux seigneuries de Mesnil-la-Horgne. Il mourut le mardi 25 octobre 1757 à l'Abbaye de Senones près de Saint-Dié.

                 Calmet

Passionné très jeune par les études, il choisit de devenir bénédictin dans la congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe. C'est au prieuré bénédictin du Breuil, à Commercy, qu'il fit ses premières études. Il les poursuivit à l'université de Pont-à-Mousson, entra comme novice à l'abbaye Saint-Mansuy de Toul en 1688 et y prononça ses vœux le dimanche 23 octobre 1689, puis fut envoyé suivre les cours de philosophie à l'abbaye de Saint-Epvre (ancienne église Saint Maurice) de Toul (Saint Epvre fut évêque de Toul vers 1500 et patron de la première paroisse de Nancy) et ceux de théologie à l'Abbaye de Munster.
Une grammaire hébraïque de Buxtorf étant tombée dans ses mains, il décida alors d'apprendre l'hébreu. Il s'attacha à son dessein avec une telle énergie et une telle constance qu'il en surmonta les difficultés sans le secours de personne. Puis, avec la permission de ses supérieurs, il se plaça sous la direction d'un pasteur luthérien nommé Fabre qui lui fournit des livres en hébreu, et lui rendit en peu de temps la lecture aisée. Les jésuites ayant remarqué ses dispositions essayèrent en vain de l'enrôler.
Il apprit aussi le grec avec une aisance remarquable, et se prépara ainsi à la lecture des Ecritures. Après son ordination, le samedi 17 mars 1696, il fut désigné pour enseigner à ses frères la lecture de celles-ci, la philosophie et la théologie à l'Abbaye de Moyenmoutier. C'est là qu'avec eux, et en prenant pour base ses leçons, il commença à réunir les matériaux pour son ouvrage «Commentaires sur l'Ancien et le Nouveau Testament» qu'il écrivit en latin. Dom Mabillon et Dom Duguet l'ayant lu lui conseillèrent de le traduire en français afin qu'un plus grand nombre de personnes puisse en bénéficier.
C'est ce qu'il fit avec son édition dont la parution s'étend de 1707 à 1716 et qu'il a achevé à Munster en Alsace où il fut envoyé en 1704 comme sous-avant et professeur d'exégèse.
Le premier volume parut donc à Paris en 1707 sous le titre «Commentaire littéral sur tous les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament» et le dernier en 1716 seulement en raison de retards.

Une deuxième édition parut de 1714 à 1720 en 26 volumes et une troisième de 1724 à 1726 en neuf volumes. En 1720 parut l'ouvrage «Mémoires qui peuvent servir de prolégomènes à l'Ecriture Sainte», qui rencontra un tel succès qu'il fut traduit en anglais, en italien, en allemand, en néerlandais et en latin.
Dom Calmet a laissé une œuvre immense. Pendant quarante années il connut une activité intellectuelle prodigieuse qui le mena, au sein de sa congrégation, d'abbayes en prieurés de son ordre, dévorant les bibliothèques et rédigeant de nombreuses compilations historiques, organisant des équipes de recherche, écrivant, corrigeant sans cesse.
Il fut nommé, en raison de ses grands mérites, abbé de Saint-Léopold de Nancy en 1718, puis envoyé à Paris, au couvent des Blancs-Manteaux, et à Saint-Mihiel où il termina les 26 volumes de son «Commentaires sur l'Ancien et le Nouveau Testament», au prieuré de Lay-Saint- Christophe, à l'abbaye Saint-Léopold de Nancy. C'est là qu'il publia la première édition de son ouvrage le plus connu : sa monumentale «Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine», ouvrage qui lui avait été commandé par le duc Léopold, et dont la deuxième édition fut écrite à Senones, capitale de la principauté de Salm, où il avait été élu abbé en 1728.
C'est dans cette grande abbaye vosgienne qu'il travailla et vécut la dernière partie de son existence, entretenant une correspondance avec de nombreux savants et qu'il rédigea une œuvre à présent oubliée, une «Histoire universelle sacrée et profane depuis le commencement du monde jusqu'à nos jours» en 17 volumes.
En 1746, il écrivit le «Traité sur les apparitions des esprits et sur les vampires», raillé par Voltaire dans son Dictionnaire philosophique.
En même temps que son «Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine», Calmet produisit une précieuse œuvre populaire en forme de dictionnaire : la fameuse «Notice de la Lorraine», le plus ancien dictionnaire historique de cette région, à laquelle Voltaire s'amusa à collaborer quelques jours en 1754 à l'occasion d'une visite qu'il rendit à Calmet. Le premier volume in-folio parut à Nancy en 1757, année de la mort de l'auteur. Le deuxième volume, édité à la diligence de son successeur et neveu Dom Fange qui a écrit sa biographie, parut en 1762.
Au XVIIIe siècle, l'histoire a été illustrée en Lorraine par plusieurs grands auteurs : le capucin Benoît Picart, historien de Toul en 1707 , le bénédictin Dom Humbert Belhomme, historien de Moyenmoutier en 1724 ; le prémontré Ch.- L. Hugo, historien de son ordre en 1734 ; les bénédictins Dom Joseph de l'lsle, historien de Saint-Mihiel en 1757 ; Dom Jean François et Dom Nicolas Tabouillot, historiens de Metz en 1769-1790. Dom Augustin Calmet, pieux religieux, plus modeste que savant, écoutant les critiques et en profitant, accueillant et aidant de ses conseils les jeunes gens qui montraient des dispositions, un des plus éminents érudits de la congrégation de Saint-Vanne, leur ami et collègue, les dépasse tous d'une tête.

Dom Calmet fut élu prieur de Lay-Saint-Christophe en 1715, abbé de Saint-Léopold à Nancy en 1718, de l'Abbaye de Senones en 1728 et supérieur général de sa congrégation à deux reprises. Le pape Benoît XIII voulut lui conférer une dignité épiscopale en lui offrant un évêché "in partibus" qu'il refusa constamment car son humilité ne pouvait accepter cet honneur. Ses restes, profanés par les sans-culottes et retrouvés vers la fin du 19ième siècle, furent inhumés une deuxième fois en présence de Mgr. Freppel, évêque d'Angers, dans la nouvelle église paroissiale de Sénones, le dimanche 26 octobre 1873.
Tant que Calmet fut en vie, Voltaire témoigna hypocritement beaucoup de respect, déférence et admiration à ce pieux bénédictin que, plus tard, il osa qualifier d'imbécile. Intéressé, il alla le visiter à Sénones où il resta six semaines en 1754, visitant la bibliothèque de laquelle il tira de grands secours pour son «Histoire Générale» dont une édition erronée venait de paraître. Il fit également, sans s'en vanter, de grands emprunts à «l'Histoire Universelle, sacrée et Profane» de Calmet pour son «Essai sur les Mœurs de Nations».

L'œuvre de Dom Calmet, éclectique et prolifique, est résumée dans ses principaux ouvrages qui sont:

  • Abrégé de l'histoire de la Lorraine (Nancy, 1734)
  • La Bible en latin et en français, avec un Commentaire littéral et critique (Paris, 1707-1716 en 23 volumes; le commentaire ayant été reproduit à part sous le titre de Trésor d'antiquités sacrées et profanes (1722 et années suivantes en 9 volumes)
  • Commentaires sur l’Ancien et le Nouveau Testament, en latin puis en français (1707-1717 en 26 volumes)
  • Dictionnaire historique, critique, chronologique, géographique et littéral de la Bible (Paris, 1722-1728 en 2 volumes), plusieurs fois réimprimés, avec des augmentations considérables; un supplément ayant été ajouté en 1728. Traduction en latin et dans les principales langues européennes.
  • Histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament et des juifs (Paris, 1718), traduit en anglais (Londres, 1740), en allemand (Augsbourg, 1759) et en latin (Augsbourg, 1788)
  • Mémoires qui peuvent servir de prolégomènes à l'Ecriture Sainte (Paris, 1720)
  • Dissertation sur les grands chemins de Lorraine (Nancy, 1727)
  • Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine (Nancy, 1728)
  • Commentaire historique et moral sur la règle de Saint Benoît (Paris, 1734)
  • Histoire universelle sacrée et profane depuis le commencement du monde jusqu'à nos jours (Strasbourg, 1735-1747) où il reprend les idées de Bossuet.
  • Histoire généalogique de la maison du Châtelet (Nancy, 1741)
  • Bible de Vence (1742)
  • Bibliothèque lorraine, ou histoire des hommes illustres qui ont fleuri en Lorraine (Nancy, 1751) contenant son autobiographie (pp.209-217)
  • Notice de la Lorraine (Nancy, 1756)
  • Traité historique des eaux et bains de Plombières, de Luxeuil et de Bains (Nancy, 1748)
  • Traité sur les apparitions des esprits et sur les vampires, ou les revenants de Hongrie, de Moravie, etc., (1746)
  • Histoire de l'abbaye de Munster, Colmar, (posthume, 1882)
  • Histoire de l'abbaye de Senones, Saint-Dié, (posthume, 1877-1881)
Le Dictionnaire Bouillet au XIXe siècle affirme, avis discutable, qu'on ne peut refuser à Calmet une "érudition immense; mais que son style est lourd, diffus, incorrect, et que l'auteur manque souvent de critique et de méthode".

       la congrégation de Saint-Maur     Montfaucon